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Constitution du système
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scolaire de l'échec | Bas de page
La Sociologie n'échappe pas à l'Histoire,
et réciproquement : chacune des deux est pour l'autre un objet
d'étude possible. Ce glissement de la sociologie de l'éducation
s'inscrit dans l'évolution même du système éducatif.
Si l'on est passé d'analyses ou l'échec scolaire était
d'abord celui d'une pédagogie à des constats décourageants
qui en font le produit d'un système, c'est aussi parce que le
statut de l'échec scolaire s'est modifié [...].
I> la constitution d'un véritable système
scolaire.
- Une politique volontariste du développement : on
représente généralement l'explosion scolaire
comme une réponse à la demande sociale. Or c'est peut
être aussi et surtout une politique volontariste. Ordonnance
du 6 janvier 1959 (Berthoin) qui prolonge la scolarité à
16 ans. Création du cycle d'observation par un décret
du même jour. Circulaire du 17 mai 1960 etc... [...]. En bref
une politique volontariste avec pour racines des raisons économiques
et sociales (retard économique, démocratisation et
égalité des chances). Pour preuve : les dépenses
totales de l'Etat pour l'éducation Nationale doublent entre
1957 et 1966 (8% à 17 %). Ainsi on ne répond pas à
la demande sociale, on la précède, c'est une politique
volontariste.
- Une politique de rationalisation : Cette politique coutant
cher, il faut rationaliser. Ainsi on prolonge la période
de détermination des choix scolaires : le décret du
3 aout 1963 (réforme Fouchet) ajoute deux années de
cycle d'observation (4e et 3e). De plus une ambitieuse politique
de construction traduit la volonté de rendre autonome le
premier cycle : un collège par jour ouvrable pendant 10 ans
à partir de 1965. Enfin, des procédures d'orientation
se mettent en place. Au niveau administratif se met en place une
véritable machine, qui prouve et éprouve sa propre
efficacité. Ces soucis gestionnaires font apparaitre les
premiers indicateurs de l'échec scolaire et de la mauvaise
gestion. On commence à leur préter attention. Or 20
ans plus tard l'échec scolaire n'a pas reculé : dérive
ou fatalité [...] ?
II> L'usage social du système scolaire
- Une société mandarinale : C'est quand les
positions sociales sont déterminées par les concours
scolaires. Si ce serait excessif de penser notre société
ainsi, il reste que le lien entre diplôme et position sociale
est très étroit en France. Exemple des grandes écoles.
Ce lien s'est d'ailleurs resserré, la croissance de la scolarisation
a entrainé une sélection plus forte, la multiplication
des diplômés accroit les différences. Bref,
"la réussite scolaire semble plus que jamais nécessaire
à la réussite sociale". Pourtant le diplôme
n'est pas une condition suffisante, mais hélas notre société
surestime le poids des diplômes.
- Stratégies sociales et hiérarchies scolaires
: Les familles adoptent des stratégies scolaires adaptées
aux objectifs qu'elles visent. Ce sont des stratégies sociales
dépendantes donc des milieux sociaux (théories du
coût/avantages) mais aussi des stratégies déterminées
par l'aval, anticipatrices. Ces stratégies créent
une relation d'ordre entre les différentes filières
scolaires, une hiérarchie ! : trois remarques : - cette hiérarchie
s'entretient et se renforce d'elle même, - cette hiérarchie
tend à s'affiner, - la responsabilité de ces hiérarchies
est partagée. Ainsi "dès lors que l'usage social
du système scolaire engendre en son sein des hiérarchies,
l'échec scolaire est inéluctable".
- Il n'est d'orientation que par l'échec : Il n'est
pas une fatalité, il est aussi indispensable de lutter contre
lui que contre la maladie. Mais dans notre système, l'orientation
est une orientation par l'échec. Il faut cependant oeuvrer
pour une orientation positive, chercher à faire faire des
études dans lesquelles l'élève trouvera son
propre épanouissement. Or il faudrait une harmonie préétablie
et celle ci ne peut exister pour deux raisons : - Inertie du système
scolaire - La demande est sociale, pas scolaire (elle est demande
de positions sociales). En fait on veut distinguer une élité
et quoi que l'on fasse la société utiliserait d'autres
moyens pour accéder à cette demande. Ainsi l'orientation
positive est exclue et l'on comprend mieux pourquoi des jugements
contradictoires sont opposés à la démocratisation
de l'enseignement.
III> L'usage scolaire de l'échec scolaire
- A quoi sert l'orientation par l'échec ? : elle accroit
la pression sélective sur les élèves, bref
il ne faut pas être orienté. Cette pression accrue
permet au système scolaire de surmonter deux obstacles majeurs
de son fonctionnement : - l'écart grandissant entre culture
scolaire et son public (distance culture école/élève,
usage utilitaire qui a détruit les motivations, savoirs scolaires
éloignés de l'expérience commune...) - difficultés
sociologiques (conduite de classe difficile, autorité larguée,
refus de l'univers des adultes). Donc la crainte de l'orientation
est une relation de pouvoir, de pression, sur les élèves.
- Le paradoxe de l'orientation prolongée : Réforme
de 1980 mieux comprise ainsi (seconde de détermination).
Une analyse optimiste pourrait la présenter comme un refus
de ségrégation précoce, une lutte contre l'échec
scolaire. Une autre plus pessimiste pourrait présenter cette
réforme comme une année supplémentaire pour
sélectionner encore plus les élèves, il faut
retarder le moment ou l'échec est définitivement sanctionné.
" La pression exercée sur les élèves ronge,
de l'intérieur, la formation dont elle prétend garantir
le niveau. Bel effet pervers d'un effet lui même pervers !
".
CONCLUSION : La voie étroite ...
Il semble en effet que dans une société
qui présente simultanément les deux caractères
d'une forte hiérarchisation
et d'un lien étroit entre réussite scolaire et réussite
sociale, il ne puisse avoir d'orientation que par l'échec...
Ne peut on rien tenter? si : il faut réduire les inégalités
sociales, il faut desserrer le lien diplôme - position sociale
ainsi que celui entre succès scolaire et réussite sociale:
rendre réparables les échecs scolaires, arréter
de prôner une seule et même section élite, insister
sur la "formation commune de base".
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